Dix ans après un premier sauvetage, l'État viendra-t-il de nouveau au secours de Thomson ? Il l'envisage depuis quelques semaines, par l'intermédiaire de son tout nouveau bras armé, le Fonds stratégique d'investissement (FSI), officiellement installé hier. Le dossier semble suffisamment urgent pour que le FSI mandate une banque d'affaires avant même que son propre directeur général soit nommé. Selon nos informations, c'est Rothschild qui planche sur Thomson pour le compte du FSI. La banque se refusait vendredià tout commentaire.
Le fonds a vocation à « sécuriser » le capital d'entreprises stratégiques. Or, Thomson, ce sont à la fois des brevets cruciaux et une situation financière tendue. En valeur absolue, le ticket d'une éventuelle entrée du FSI au capital serait raisonnable : Thomson ne pèse plus que 230 millions d'euros en Bourse. L'intervention du FSI est donc envisagée pour faciliter la restructuration financière et stratégique de Thomson. Le groupe étudie parallèlement d'autres options mais toutes sont difficiles à exercer dans le contexte de crise.
Frédéric Rose, directeur général de Thomson depuis septembre 2008, ne cache d'ailleurs pas la gravité de la situation. Depuis que le fonds d'investissement Silver Lake a demandé le remboursement de ses obligations convertibles pour un montant de 500 millions d'euros, le groupe supporte un endettement net de 1,3 milliard. Si Thomson génère environ 450 millions d'euros de liquidités par an, il doit faire face à des frais financiers de 70 millions et à des pertes sur les activités arrêtées ou en cours de cession de 280 millions d'euros.
Cette situation inconfortable pourrait encore se détériorer si le nouveau management doit mener la restructuration du groupe au pas de charge. Car Thomson a besoin d'une nouvelle stratégie.
Le joyau du groupe
Le groupe, disparate, s'est construit sur de nombreuses acquisitions 19 en moins de trois ans qui n'ont jamais été totalement intégrées. Les systèmes (décodeurs de télévision payante, box Internet…), et les services (postsynchronisation de films, gestion de réseaux de diffusion…) représentent plus de 90 % du chiffre d'affaires mais perdent de l'argent. Seul le portefeuille de brevets en gagne. C'est, aux yeux de Frédéric Rose, le joyau du groupe, et c'est lui qui pourrait justifier une intervention du FSI.
Fort de ses 3 900 chercheurs, Thomson dépose 2 000 nouveaux brevets par an et gère un portefeuille de 50 000 brevets, dont certains sont cruciaux, comme ceux sur les formats de compression de la musique et de la vidéo. Frédéric Rose a donné une nouvelle impulsion à cette division qui doit se concentrer sur toutes les technologies liées à l'image vidéo.
En revanche, Thomson devra se décider à arrêter des activités, fermer des usines comme celle d'Angers. Tout cela coûte beaucoup d'argent. Il devra également céder des actifs, ce qui, dans les conditions actuelles, risque d'entraîner d'importantes dépréciations.