Vous
les imaginez encore en jeunes boutonneux, avachis dans leur canapé,
massacrant des ennemis virtuels ? Halte aux idées reçues ! Un tiers des
adeptes de jeux vidéo sur la planète sont en fait... des joueuses. Et
l'âge moyen des pratiquants, qui atteignait 33 ans en 2005, ne cesse
d'augmenter. Le jeu vidéo est désormais un loisir grand public. Aux
Etats-Unis, le chiffre d'affaires du secteur dépasse, depuis plusieurs
années déjà, celui des salles de cinéma et s'apprête à coiffer au
poteau le marché de la musique. En France, alors que les achats de
disques compacts et autres supports musicaux ont chuté de 15 % en un
an, le budget des ménages consacré aux jeux vidéo a progressé de 5 %,
selon l'institut GfK. Dopé par la montée en puissance des consoles de
nouvelle génération lancées depuis deux ans - Xbox 360 (Microsoft), PS3
(Sony), Wii (Nintendo)... -, le marché mondial devrait bondir de 30 %
en 2007, à près de 38 milliards de dollars. Plus de 70 millions de
consoles et 590 millions de jeux seront écoulés cette année !
Les éditeurs surfent sur ces nouvelles tendances. Après l'immense
succès des Sims (Electronic Arts), jeu permettant de construire une
famille virtuelle, Ubisoft a présenté au récent Salon E3 de Santa
Monica une série de jeux pour les filles de 6 à 14 ans. Le champion
français a également affecté une structure de développement aux jeux
dits « casual », très en vogue actuellement. Simples d'utilisation et
ne requérant pas de passer des heures derrière un écran d'ordinateur,
les yeux rougis de fatigue, ils sont adaptés à un public adulte n'ayant
que peu de temps à consacrer à ce loisir.
En voie de maturation, le marché se segmente et le grand gagnant est
Nintendo (lire page 12). Laissant ses concurrents Microsoft et Sony se
livrer à un combat frontal et à une surenchère technologique, le
constructeur japonais a su inventer, avec sa console portable DS Lite
et, surtout, avec la Wii, de nouvelles façons de jouer qui séduisent
toute la famille. Ubisoft a tout de suite adhéré à cette stratégie
audacieuse en développant de nombreux jeux sur la Wii. Pari gagné, avec
des performances financières époustouflantes ! (lire page 13). Le
succès de Nintendo provoque un véritable appel d'air pour les éditeurs
de plus petite taille, trop fragiles financièrement pour supporter les
coûts de développement élevés liés aux jeux pour les nouvelles consoles
de Sony ou de Microsoft. Pas étonnant, donc, qu'Infogrames, loin de sa
splendeur passée, mise beaucoup sur ces machines pour se refaire une
santé. Mais la partie n'est pas gagnée, car la concurrence sera rude.
Autre évolution importante du marché : sa mutation vers les
nouvelles technologies de l'information. Les dernières consoles se
connectent à Internet, ce qui autorise de nouvelles sources de revenus
(téléchargement de jeux, options payantes, publicité en ligne...).
Mieux, de nouveaux modèles économiques surgissent. Ainsi, les jeux sur
téléphone portable bénéficient de perspectives radieuses (lire page
13). Quant aux MMOG (massively multiplayer online game), ces services
en ligne qui permettent à des milliers d'internautes de jouer en
réseau, ils fonctionnent selon un modèle d'abonnement, ce qui réduit le
caractère cyclique du marché. Cocorico ! Dans chacune de ces catégories
prometteuses, la France a son champion : Gameloft dans la première,
Vivendi Games dans la seconde. Symbole de la mutation du secteur, la
branche jeux du groupe de médias frôlera le milliard d'euros de chiffre
d'affaires cette année, grâce au succès mondial de son World of
Warcraft, aux 9 millions d'abonnés. Une nouvelle preuve qu'Internet est
en train de changer la face du monde
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