( je ne connais pas l'origine de cette note trés interressante)
De plus, comme le souligne Philippe Crouzet, le président du directoire, ces deux dernières années, plusieurs chocs sont venus conforter la position de Vallourec. D'une part, la catastrophe de la plate-forme BP Macondo, dans le golfe du Mexique, a conduit à un renforcement des normes de sécurité, et notamment de la qualité des tubes, pour éviter les risques de fuite. Ce qui renforce l'attrait des produits haut de gamme de Vallourec. D'autre part, le ralentissement du nucléaire après la catastrophe de Fukushima et la découverte de gisements non conventionnels aux Etats-Unis sont en train de faire basculer le mix énergétique vers le gaz, promu énergie vedette des trente à cinquante prochaines années. Or ces nouveaux gisements, gaz et pétrole de schiste, qui représentent les trois quarts des nouveaux puits américains, nécessitent de forer à l'horizontal, un cauchemar pour les tubes qui doivent se plier à 90 degrés... et une bénédiction pour Vallourec.
Ces bouleversements majeurs ont conforté le Français dans sa stratégie de développement international et son positionnement sur le haut de gamme du marché. Un segment d'une trentaine de milliards de dollars, fortement concentré puisque tenu aux deux tiers par trois acteurs mondiaux : Vallourec, l'Argentin Tenaris et le Japonais Sumitomo. D'autant que ce dernier est un partenaire de longue date du Français, avec qui il a noué des accords de licence et partage de nombreux investissements.
Les aléas du capitalisme européen et du boom des télécoms ont permis au français de conquérir cette position enviable. En un siècle, Vallourec, né en 1930 du rapprochement de trois fonderies du Nord (Valenciennes, Louvroil et Recquignies) a fait le ménage en France dans ce métier du tube sans soudure, inventé à la fin du XIX e siècle par les frères Mannesmann, fondateurs du conglomérat éponyme. La mise au point, dans les années 1960, d'un dispositif de connexion par vissage, étanche sans joint, renforcera Vallourec sur le marché du pétrole et lui permettra de fusionner en 1997 avec Mannesmann. Le démantèlement du célèbre conglomérat qui a suivi son rachat en 2000 par l'opérateur télécoms Vodafone, permettra au Français, en 2005, grâce à l'appui financier de l'habile Vincent Bolloré, de récupérer la totalité de l'Allemand, y compris ses précieuses filiales brésiliennes.
Combinaison gagnante
L'alliance de la compétence en matière de vissage du Français et de la science des laminoirs de l'Allemand vont rendre alors le groupe incontournable dans le monde. Aujourd'hui, la moitié de son chiffre d'affaires provient des Amériques, contre seulement 14 % d'Allemagne et 4 % de France. Avec des ratios de performance eux aussi « allemands » : une marge d'exploitation de 15 % en 2010. C'est cette combinaison gagnante d'une position forte et haut de gamme sur un métier en croissance qui a fait exploser les comptes de l'entreprise jusqu'en 2008, suivant fidèlement la courbe de hausse des cours du pétrole.
Mais les tubes, même sans soudure ne montent pas jusqu'au ciel, et en 2009 la catastrophe industrielle très prévisible est arrivée. Les entreprises avaient amassé des stocks considérables et ont stoppé net leurs commandes au premier retournement de marché. D'un coup, Vallourec a vu diminuer ses volumes de moitié et son chiffre d'affaires de plus de 30 %. Un rappel sévère que ce marché des biens d'équipement dans l'énergie est éminemment cyclique.
Si le prix du pétrole influe sur l'activité, celui des matières premières (minerai de fer, coke et ferraille) est déterminant pour sa rentabilité. D'autant que l'impossibilité de se couvrir sur les achats de fer, non coté, renforce l'effet sur les résultats, à la hausse comme à la baisse. En 2010, avec près de 1,5 milliard d'euros, les matières premières ont représenté plus de 40 % des coûts de l'entreprise, deux fois plus que la main d'oeuvre. Vallourec est encore largement intégré verticalement, possédant ses propres aciéries. Au Brésil, le groupe est même propriétaire de sa mine de fer et de plantation d'eucalyptus pour alimenter les hauts-fourneaux.
Si l'on ajoute le facteur monétaire, casse-tête de tous les grands exportateurs, on comprend la décision de Vallourec d'accroître considérablement ses capacités de production sur les Amériques. Avec Sumitomo, le groupe a investi 2 milliards d'euros pour doubler sa production au Brésil, qui représentera bientôt plus du quart de ses besoins et de son chiffre d'affaires. Le Français se place pour le prochain boum de l'offshore brésilien : des gisements situés sous 6.000 mètres d'eau puis de roche. Des conditions idéales pour les produits les plus sophistiqués de la firme. Enfin, la capacité de son usine de Youngstown, dans l'Ohio, a été également doublée pour satisfaire l'appétit des producteurs américains.
Le pari ambitieux de Vallourec est donc de surfer sur la croissance programmée de la demande en augmentant son appareil industriel et en maintenant son avance dans le haut de gamme. Car les inévitables chinois se sont lancés en masse sur ce métier si appétissant. Pour l'instant, ils ne sont pas à la hauteur dans ce domaine qui requiert un savoir-faire des opérateurs long à installer. Mais ils progressent et raflent les besoins plus bas de gamme.
Le français doit donc courir plus vite, même si cela se fait au détriment de ses réserves financières. Les coûteuses usines ne tourneront à pleine capacité qu'en 2013. Cela rend nerveux les observateurs qui scrutent le coûts des matières premières et la sensibilité des pétroliers américains à la chute des prix du gaz.
Autant de paramètres qui ne dépendent pas de Vallourec, qui ne compromettent pas son avenir prometteur mais qui peuvent brouiller les performances à court terme. Comme disait Victor Hugo, le présent est un combat et l'avenir une victoire. Le seul problème, c'est que nous ne vivons que de présent.
Chiffres clefs Points forts Points faibles
-Chiffre d'affaires (2010) : 4,5 milliards d'euros
-Résultat net : 410 millions
-Activités : pétrole et gaz (53 %), énergie électrique (17 %), mécanique (9 %), pétrochimie (8 %), auto (7 %)...
-Effectif : 21.700 personnes-Leader sur un marché très concentré
-Avance technologique
-Implantations mondiales-Marché cyclique
-Dépendance aux matières premières
-Gros investissements en cours