Ralentissement ou récession ? Hard landing ou soft landing ? La crise financière provoquera-t-elle un atterrissage brutal ou en douceur des économies ? Personne n’en sait rien, mais les dégâts sont d’ores et déjà sensibles. Chômage, faillites en chaîne et menace d’une récession sévère inquiètent tous les observateurs. « Nous nous sommes laissés endormir par la potion magique du crédit facile, » juge l’essayiste Mike Whitney, toujours en verve, et qui manifeste cette fois une pointe d’énervement. Mais comment ne pas être énervé justement, par la perspective d’une crise très prévisible et que l’on a pourtant laissé couver au nom de la religion du laisser faire ? Quant aux conséquences - peut-être dévastatrices - elles seront comme toujours payées au premier chef par les plus démunis.
« Les booms du crédit ne se terminent pas en inflation comme la plupart le croient. Les booms du crédit SONT de l’inflation et se terminent par la déflation. Ce boom du crédit n’est en rien différent. » Mike Shedlock, “Mish’s Global Economic Trend Analysis”
Par Mike Whitney, Information Clearing House, 11 septembre 2007
Les jours du dollar comme « monnaie de réserve » pourraient être comptés. En août, les Banques Centrales étrangères et les gouvernements se sont débarrassées d’un gros 3,8% de leurs avoirs de dette américaine, sous forme de bons du Trésor. L’augmentation du chômage et la baisse de l’immobilier en cours ont fait naitre la crainte d’une récession qui a amené les investisseurs étrangers prudents à courir vers la porte de sortie. La Chine, le Japon, Taiwan ont dirigé le mouvement vers les opérations de ventes qui ont provoqué le déclin du dollar le plus marqué depuis 1992.
Dans une certaine mesure les pertes ont été masquées par le rebond des ventes du Trésor aux investisseurs américains qui fuyaient en masse le marché monétaire. Ces investisseurs tentaient d’éviter la chute des fonds d’investissement qui ont été contaminés par les actifs adossés à des crédits hypothécaires (Mortgage Backed Assets ou MBS). Ils ont donc évidemment choisi d’acheter des bons du Trésor US qui sont réputés sûrs. Mais cela ne change rien au fait que les bases du dollar sont continuellement érodées et que ses soutiens à l’étranger sont en train de disparaître. Les bons du Trésor ne sont plus désormais considérés comme des « refuges. »
Le dollar est tombé au plus bas depuis 15 ans face à 6 des devises les plus activement échangées, plantant ainsi le décor pour une panique matinale à Wall Street.
Les investissements étrangers et la dérégulation des devises ont été une véritable aubaine pour les bourses qui ont profité d’un afflux constant de capital peu coûteux. C’était également une aubaine pour des consommateurs dépensiers qui adorent emprunter à taux bas des monceaux d’argent liquide pour se payer leurs joujoux, leurs 4x4 et se faire construire de petits châteaux [1].
Naturellement tout cela était trop beau pour durer - en général cela ne dure pas. L’activité économie se contracte, il y a un resserrement du crédit, et les bourses sont prises de soubresauts. Pire encore, le monde perd rapidement confiance dans le rôle dirigeant de l’Amérique dans tous les domaines, des droits de l’homme au réchauffement climatique. En bien des cas les USA paraissent dramatiquement à l’écart de leur temps. Le monde est à la recherche de solutions innovantes aux problèmes qui menacent notre espèce, mais l’administration Bush insiste pour s’en tenir à un calendrier qui conviendrait mieux à des chevaliers des temps obscurs du moyen-âge. Les conséquences sociales et économiques de cette courte vue sont évidentes. C’est un désastre.
Avec l’accélération de la fuite des capitaux, le taux d’intérêt aux USA montera, le chômage gonflera et le dollar tombera. Rien ne peut l’empêcher. Les marchés et les consommateurs américains vont devoir limiter leur appétit glouton pour le crédit étranger. La saison des cadeaux est terminée.
Les investisseurs étrangers détiennent plus de 4 400 milliards de dollars de dette américaine, sous la forme de bons du Trésor et de titres. S’ils vendent seulement quart de cette somme les USA sentiront la douleur de l’hyper-inflation. Durant la dernière décennie, les étrangers étaient avides d’acquérir nos bons du Trésor et nos capitaux, avalant les 800 milliards de l’énorme déficit de la balance commerciale et maintenant la demande pour le dollar à un niveau artificiellement élevé. Mais comme pour les souscripteurs d’emprunts immobiliers dont le taux incitatif [2] arrive soudain à son terme, les USA vont devoir faire face à un douloureux réajustement : des remboursements plus élevés et des revenus moins généreux pour se payer leurs caprices.
Ce petit jeu aurait peut-être pu continuer un peu plus longtemps si la politique étrangère de Bush ne nous avait aliéné amis comme ennemis. Mais peut-être pas. Après tout, la politique financière généreuse de la Fed, venant s’ajouter aux dépenses extravagantes de Bush - 3 000 milliards de dollars de dette de l’état supplémentaires en 6 ans - condamnait le pays depuis le début. Les dépenses à crédit ont été la règle depuis le premier jour. Arrive maintenant la gueule de bois.
On s’attend à ce que Bernanke baisse les taux d’intérêts le 18 septembre. Cette décision fournira un peu plus de la drogue du crédit facile aux accros de Wall Street mais elle pourrait aussi déclancher une fuite panique du dollar. C’est ce qui empêche le patron de la Fed de dormir.
L’équipe Bush a été avertie plusieurs fois - par la Banque des Règlements Internationaux, la Banque Mondiale, le Fonds Monétaire International, la Banque Centrale Européenne - que sa politique était « insoutenable » et se terminerait par une crise économique. Mais elle a ignoré les critiques avec sa même indifférence habituelle, comme pour celles portant sur la guerre d’Irak.
pourquoi devraient-ils s’en soucier, si le pays devait souffrir ? Leurs amis bénéficieraient toujours des coupes massives - et non financées - dans les impôts. Leurs armées de mercenaires privés et leurs contractants de marchés sans appel d’offre auraient toujours leurs dessous de table. Les Démocrates auraient toujours leurs énormes dépenses de guerre « hors budget » [3] Et ils seront toujours capable d’imprimer autant de monnaie sans valeur qu’ils le souhaitent, jusqu’à ce que le dernier sou soit vidé des coffres publics.
Pas de soucis. En plus, les média feraient le ménage après eux, avec leurs habituels bavardages. Au fur et à mesure que les calamités affecteront l’économie, nous pouvons nous attendre à assister au défilé habituel de menteurs au brushing impeccable, chantant la gloire du « marché, » de la dépense effrénée et de la consommation.
Les problèmes que nous affrontons aujourd’hui auraient pu être facilement repérés par quiconque voulant aller au-delà de la rhétorique creuse des optimistes patentés de la TV ou de leurs associés, les chauffeurs de salle de la Maison Blanche. Au lieu de cela, nous avons été anesthésiés par la potion magique des taux d’intérêts bas de Greenspan et par la danse du ventre de la guerre contre l’impôt de Bush, nous imaginant qu’ils avaient découvert une voie nouvelle conduisant à la prospérité.
C’était un attrape-nigaud. Ces sept ans de somnambulisme nous ont coûté cher. Le chômage augmente, les dépenses des ménages baissent, le marché de l’immobilier a glissé vers la récession et la bourse est prise de soubresauts comme un lave-linge surchargé. Tout ceci aurait pu être prévu par quiconque capable de faire preuve d’un minimum de pensée critique et d’une bonne dose de scepticisme à l’égard du gouvernement.
Sachez le : les dépenses de consommation représentent 70% du PIB. Ce qui signifie que les salaires doivent augmenter plus que l’inflation, sinon l’activité économique ne peut croître. C’est aussi simple que cela. [4] Comment donc se fait-il que 50% des américains continuent de croire aux absurdités de la théorie économique de l’offre [5] défendue par Bush, selon laquelle les réductions d’impôts pour les super-riches renforcent l’économie ? Comment donc est-ce censé augmenter les salaires ou donner naissance à une classe moyenne prospère ? Si nous voulons une économie prospère les salaires doivent progresser au même pas que la productivité, permettant ainsi aux salariés d’acheter ce qu’ils produisent.
Greenspan le sait. Comme Bush. Mais ils ont choisi de dissimuler cette réalité derrière l’écran de fumée du crédit facile, leur permettant d’affaiblir le dollar, d’installer à l’étranger des milliers d’entreprises, de délocaliser trois millions d’emplois industriels, de financer une guerre illégale et de maintenir le flot empoisonné des 800 milliards de dollars de la balance commerciale en direction des bons du Trésor et des investissements. En réalité, il n’y a eu aucune croissance économique depuis que Bush est entré en fonction en 2000. Ce à quoi nous avons assisté, c’est à une bulle augmentant sans fin les dettes des ménages et des entreprises, amplifiée par un système de « finance structurée » qui transforme par un coup de baguette magique les dettes (les emprunts subprime) en titres et accroît leur valeur via l’effet de levier.
Et voila. Aucune croissance, rien d’autre qu’une myriade d’instruments financiers adossés à des dettes, portant des noms bizarres (CDO, MBS, CDS), superposés les uns au dessus des autres en une en une pile branlante. C’est cela que nous dénommons « richesse, » ici, aux USA.
Ce ne sont qu’illusions. Le système de la finance, qui s’est découplé de la sphère productive de l’économie, commence à montrer des signes inquiétants d’instabilité. C’est ce qui explique la rupture dans le marché des bons des Trésor. Les jours heureux où nous équipions nos armées, financions nos marchés et construisions notre société de propriétaires « subprime » sur le dos de prêteurs étrangers sont terminés. La bourse est en route pour la déchèterie et l’immobilier mène la danse.
Les empreintes sanglantes de Greenspan
Les problèmes ont commencé lorsque Greenspan a baissé les taux d’intérêt à 1% en 2003, durant plus d’une année, injectant ainsi des milliers de milliards de crédit bon marché dans l’économie. Cela a créé une apparence de prospérité mais a également donné naissance à une grosse bulle immobilière, agitée aujourd’hui par les spasmes de l’agonie. La Fed a donné son aval à nombre d’escroqueries de la « finance créative » qui ont abaissé les critères d’obtention de prêts et ont transformé le fiasco des « subprime » en une machine infernale de 1 500 milliards de dollars.
Les dégâts dans l’immobilier sont presque trop énormes pour rester compréhensibles. La bulle du crédit hypothécaire vaut à peu près 5 500 milliards et les prix n’ont qu’à peine commencé à chuter. La route est encore longue avant d’atteindre le fond et promet d’être sanglante. Deux millions de propriétaires vont perdre leur maison. 151 sociétés de crédit hypothécaire ont déjà fait faillite. Nombre de Hedge Funds - lestés de milliards de dollars sous forme de titres adossés aux emprunts hypothécaires - se battent pour rester en vie. La plus troublante des prospectives est sans doute celle de Robert Schiller [6] , un enseignant de Yale, qui pense que le prix de l’immobilier pourrait décliner jusqu’à 50% dans les marchés les plus « chauds. » Les effets sur l’économie américaine seraient considérables. Si d’autres facteurs entrent en jeu, comme un effondrement de la bourse suivi par une période de déflation, nous pourrions voir les prix de l’immobilier baisser de 90% comme ils le firent entre 1928 et 1933.
Possible
En général, les bulles immobilières se dégonflent très lentement, sur une période de 5 à 10 ans. Pas cette fois. Le problème du crédit sur les marchés accélère le rythme de la baisse. Le cancer des subprime s’est diffusé dans toutes les catégories d’emprunts et a percolé dans le système bancaire. C’est ce qui oblige les banques à mettre de côté du liquide pour couvrir les pertes potentielles (des CDO et des titres adossés aux crédits immobiliers devenus irrécupérables). Aujourd’hui, même les emprunteurs solvables se voient refuser les prêts. Au même moment, « près de la moitié des emprunteurs à un taux d’intérêt variable sont incapables de refinancer leurs emprunts. C’est une source d’inquiétude majeure pour les responsables alors que selon les estimations, 2,5 millions d’emprunts immobiliers accordés à des souscripteurs aux faibles revenus passeront à des taux plus élevés à la fin de l’année. » (Associated Press)
Pensez-y. Il ne s’agit plus seulement de certains types d’emprunts - Subprime, Alt-A, piggyback, amortissement négatif, intérêts seulement [7] - de l’ordre de 40%, disparaissant du jour au lendemain. Même les demandeurs présentant des garanties sont refusés parce que les banques mettent en réserve leur capital. Ce qui suggère que les banques traversent une passe difficile et dissimulent des pertes qui sont maintenues hors bilan.
Donc, il est difficile d’obtenir un emprunt. Et si vous en avez déjà un vous pourriez ne pas être en mesure de le renouveler. Ce qui va augmenter considérablement les faillites dans le secteur immobilier. ( De fait, le LA Business Journal rapporte que les ventes de maisons ont plongé de 50% en un mois. Nous pouvons nous attendre à des chiffres semblables dans toutes les zones à risques )
Les malheurs du dollar
Les difficultés qui attendent le dollar sont aussi graves que celles de l’immobilier. La bourse, les fonds d’investissement vacillants, comptent sur une baisse des taux d’intérêt, mais ignorent les effets que cela aura sur le billet vert. Si Bernanke baisse les taux - comme tout le monde l’espère - le dollar peut perdre pied. Nous voyons déjà l’or atteindre de nouveaux sommets (au-delà de 700 dollars l’once), et c’est une nouvelle indication de la faiblesse du dollar et d’une éventuelle vente des bons du Trésor américain. Si Bernanke baisse les taux, le dollar va plonger.
Gary Cooper détaille ce risque dans son article « L’espoir d’un assouplissement de la politique de la Fed dope l’Euro et le cuivre. »
« La différence des taux d’intérêts a joué un rôle clé dans la détermination des taux de change. Depuis que la Banque Centrale Européenne a débuté sa campagne de hausse des taux en décembre 2005, l’avantage du dollar sur l’euro en terme de taux d’intérêt s’est réduit de 2,4% à 0,7% aujourd’hui. De ce fait, la Fed ne peut s’offrir qu’une petite baisse de taux pour renflouer les banquiers de Wall Street qui détiennent des emprunts subprimes empoisonnés tout en évitant de mettre le dollar en chute libre. Mais cela ne suffira peut-être pas pour prévenir une récession de l’immobilier dans les mois qui viennent. »
Après les années d’excès sous la présidence de Greenspan - 800 milliards de dollars de déficit, une guerre coûtant 9 milliards par mois, et une augmentation de 13% annuels de la masse monétaire, - ce pauvre dollar n’a plus le choix. Si la Fed baisse les taux, le tout puissant dollar sera transformé en canard boiteux un jour d’ouverture de la chasse.
Le papier commercial : ce que vous ne connaissez pas ne peux pas vous nuire
Le Papier Commercial est un système qui n’est que rarement compris en dehors du cercle des investisseurs. C’est cependant un élément critique permettant aux marchés d’opérer sans à coups. « Le papier commercial [8] est un billet à court terme, bénéficiant d’une notation élevée, qui offre aux investisseurs un refuge avec un rendement légérement supérieur à celui des Certificats de Dépôts ou des bons du Trésor. Les banques utilisent cet argent pour acheter des investissements à long terme comme les créances d’entreprises, les crédits sur l’automobile, les crédits revolving, ou les emprunts hypothécaires. » [9]
Le papier commercial a disparu à un rythme alarmant le mois dernier. 240 milliards de dollars sont sortis du marché uniquement durant les trois dernières semaines. (Il y a 2 200 milliards de papier commercial en circulation aux USA). Le papier commercial est au cœur de la crise du crédit qui se répand dans les marchés financiers et il pourrait entraîner une catastrophe massive. Les grandes banques sont paniquées - et « panique » est sans doute une litote. Voyez cet article du Telegraph [10] qui donne un surprenant résumé de ce qui passe en sous main.
Telegraph : les banques font face à une bombe à retardement de 10 jours sur le crédit
« Les plus grandes banques anglaises pourraient être forcées de sortir 100 milliards d’euros durant les dix prochains jours, car la crise du crédit qui s’est emparé du marché financier mondial répand de nouvelles vagues de désordres. »
« De l’ordre de 20% des emprunts à court terme émis par les banques européennes vont arriver à échéance entre le 11 septembre et le 19 septembre. Les grandes banques craignent d’avoir a refinancer la plupart de ces emprunts par des fonds sortis de leurs coffres, augmentant la tension pour équilibrer leurs comptes. »
« Des dizaines de milliards de livres de ces emprunts sous forme de papier commercial se sont entassés dans le système financier car les investisseurs apeurés ne veulent plus en acquérir. A peu près 23 milliards de livres de ces emprunts expirent le 17 septembre. »
« La crainte que les banques éprouvent à l’approche de cette échéance est la véritable raison expliquant que les prêts entre banques sont désormais interrompus, selon plusieurs sources informées du marché monétaire. »
« Les banques entassent du liquide pour se préparer à cette semaine de « double roulement » qui verra les emprunts à court terme et ceux à quatre mois arriver à leur terme, ce qui exacerbe un problème qui est au cœur de la crise du crédit. »
Il y a heureusement encore quelques journaux - comme le Telegraph - qui continuent d’informer. Ce n’est pas le cas aux USA.
Il y a à peu près 1 300 milliards de papier commercial adossé à des avoirs (ABCP Asset Backed Commercial Paper) circulant sur le marché américain. Ce sont des obligations associées à des titres basés sur les emprunts hypothécaire (MBS Mortgage Backed Securities) dont personne ne veut, et qui non pas de valeur reconnue par le marché. On les appelle des « déchets toxiques. » (Personne n’achète quoi que ce soit associé de près ou de loin au titres immobiliers)
Des centaines de milliards de dollars de Papier Commercial ont été émis par les Structured Investment Vehicles (SIV) et les « conduits » qui sont des filiales des grandes banques. Les banques ont maintenu ces opérations à l’écart, mais elles sont maintenant en pleine lumière parce qu’elle ne peuvent faire face à leurs obligations et sont coincées avec des milliards de Papier Commercial qu’elles ne peuvent refinancer. (Le lecteur peut se rappeler qu’Enron menait des opérations semblables dissimulées hors bilan avant qu’ils soient mis en faillite).
Les banques sont aujourd’hui contraintes d’assumer la responsabilité du Papier Commercial émis par leurs filiales, ce qui signifie qu’elles doivent disposer de suffisamment de capital pour couvrir les pertes.
Cela a l’air compliqué ? Ne vous découragez pas déjà !
La conclusion est celle-ci : Les banques sont responsables pour des centaines de milliards de dollars de Papier Commercial qui ne seront sans doute pas refinancés. Il semblerait bien qu’elles n’ont pas les réserves requises pour couvrir les pertes.
C’est pourquoi nous continuons à penser que les banques sont en difficultés. [11]
Selon le Wall Street journal :
« Est-ce que les banques et leurs actionnaires n’ont rien à craindre ? Pas vraiment... Des pertes négligeables en août ont suffi à contraindre les banques à se retourner vers les autorités pour obtenir de l’aide. Les régulateurs pourraient décider que le meilleur moyen pour prévenir une répétition serait d’obliger les banques à détenir plus de capital. Ils pourraient même limiter certains types de transactions. De telles décisions pourraient être bonne pour l’économie, mais réduiraient la profitabilité des banques. » [12]
Si vous lisez soigneusement je crois que vous serez d’accord pour juger avec moi que le Wall Street Journal suggère que les banques avaient besoin de « plus de capital » même après des « pertes négligeables. » Les difficultés sont bien plus sérieuses, aujourd’hui.
Les difficultés des banques ne sont jamais insignifiantes. C’est la raison pour laquelle il y eut tant d’efforts pour dissimuler la véritable source du problème. Lorsque les gens perdent confiance dans les banques, ils perdent confiance dans le système. Avec pour résultat l’agitation sociale.
Ne croyez pas que la Maison Blanche n’en ait pas conscience.
Atterrissage forcé
Avec le branle imminent qui attend les principales banques d’investissement, le trajet s’annonce cahoteux et sombre. Les politiques imprudemment dépensières de ces sept dernières années nous ont rapproché comme jamais du moment de solder les comptes. C’est le professeur Nouriel Roubini qui a le mieux résumé la situation dans un récent billet intitulé « Le prochain atterrissage forcé . »
« L’assouplissement prochain de la politique monétaire de la Fed n’évitera pas à l’économie et aux marchés financiers un atterrisage forcé, car ce sera trop peu et trop tard. La Fed a sousestimé la gravité de la récession dans l’immobilier, ses effets induits sur les autres secteurs d’activité, et la contagion du carnage dans les subprime aux autres marchés d’emprunts immobiliers et aux marchés financiers en général. L’assouplissement de la Fed ne fonctionnera pas pour plusieurs raison : La Fed baissera le taux trop lentement, comme si elle était toujours préoccupée par l’inflation et l’aléa moral [13] que constituerait la sauvegarde d’investisseurs et de prêteurs imprudents ; nous avons une surabondance de maisons, d’autos, et de biens de consommation durable, et la demande pour ces biens devient insensible aux taux intérêt lorsque vous avez une surabondance qui demande des années à être écoulée ; les problèmes graves du crédit et de l’insolvabilité ne peuvent être résolus uniquement par la politique monétaire ; et les injections de liquidité de la Fed ont été mises de coté par les banques sous la forme d’un excès de réserves, mais n’ont pas calmé les secteurs du marché financier où la crise des liquidités est la plus sévère et va s’aggravant. La Fed fournit des liquidités aux institutions financières, mais ne peut en fournir directement aux hedge funds, aux banques d’investissement, et aux autres entreprises utilisant un effet de levier, ou dans le secteur du marché du crédit - comme les billets de trésorerie adossés à des avoirs (ABCP), où la crise est sévère. Donc la crise des liquidités dans la plupart des marchés du crédit reste sévère, même sur le marché interbancaire, habituellement liquide.
Soupe populaire
Il n’y a pas de solutions rapides ou de « recette miracles, » comme Bush aime à le dire. Il faudra des années pour sortir de ce bourbier. D’ici là, il n’y a rien a attendre sinon un affaiblissement du dollar, la continuation de la crise immobilière et la perspective d’un état policier qui nous fera tenir tranquille jusquà ce que nous ayons rejoint le rang des files d’attentes pour les soupes populaires.
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