Touchés par la crise, les hedge funds devraient ralentir leur activité
lE MONDE ECONOMIE | 27.08.07 | 13h
Les hedge funds ont certes été de gros investisseurs de titres adossés aux subprimes. Mais ils sont aussi plus fondamentalement victimes de leur audace financière. Pour garantir un rendement maximal - de l'ordre de 15 %, voire 30 % par an -, ils ont recours massivement à l'emprunt. L'effet de levier induit leur permet de doper leurs performances. Ces dernières années, la combinaison de taux d'intérêt faibles et de hausse des marchés a permis de faire accepter des montages particulièrement périlleux. Certains fonds comme ceux gérés par la banque d'investissement Bear Stearns, aujourd'hui au bord de la faillite, avaient emprunté jusqu'à dix fois la mise nécessaire. "Il y a eu des abus", reconnaît aujourd'hui le représentant d'un hedge fund. "Il y a un trou noir dans la régulation internationale", ajoute Dominique Pilhon, président du conseil scientifique d'Attac, "il faudrait limiter le niveau d'endettement acceptable", estime-t-il.
EFFET BOULE DE NEIGE
De fait, l'effet de levier joue à la hausse comme à la baisse, et les dettes contractées ont creusé les pertes. Elles ont aussi provoqué un effet boule de neige, mettant en difficulté les banques prêteuses, menaçant in fine la stabilité du système financier international. En 1998, la faillite du fonds Long Term Capital Management (LTCM), avait failli déclencher un scénario-catastrophe, évité par le sauvetage des banques et l'intervention salutaire de la Réserve fédérale américaine.
La crise rappelle donc les banques à la prudence. Avec les premières faillites de fonds, elles ont réalisé qu'elles avaient sans doute mal évalué les risques et renforcent les garanties réclamées, vis-à-vis des fonds spéculatifs, mais aussi des autres emprunteurs.
Le choc des subprimes relance aussi la polémique sur la transparence des hedge funds. Ces derniers, souvent domiciliés dans des paradis fiscaux (Suisse, îles Caïmans...) n'ont pas l'obligation, la plupart du temps, de rendre compte de leurs investissements. Confidentialité oblige, personne ne connaît leur exposition aux risques, et encore moins aux titres adossés au marché des subprimes. Ce flou, qui empêche de mesurer l'impact exact de la crise, nourrit les critiques. "On ne peut pas continuer comme ça avec quelques hedge funds qui empruntent à n'importe quel prix, à n'importe qui, sans qu'on sache à qui, dans n'importe quelles conditions", s'est emporté le président de la République, Nicolas Sarkozy, le 16 août depuis sa résidence de vacances à Wolfeboro (New Hampshire). Même chez les fonds spéculatifs, les critiques fusent. "Les titres sont aujourd'hui en de mauvaises mains", signale l'un d'entre eux, qui reproche à certains d'avoir pris des risques inconsidérés.
La chancelière allemande et présidente du G7, Angela Merkel, pourra par conséquent reprendre son cheval de bataille pour imposer aux fonds spéculatifs le code de bonne conduite qu'elle n'avait su faire adopter par les Etats-Unis et le Royaume-Uni lors du dernier G8 à Washington. "La crise devrait persuader les Anglo-Saxons de se mettre autour de la table", prédit Christian de Boissieu, président du Conseil d'analyse économique (CAE).
La fin de l'âge d'or n'est toutefois pas encore signée pour les hedge funds. D'une part l'encadrement de ces derniers sera sans doute très complexe à mettre en oeuvre. "Cela relève du fantasme", estime Noël Amenc, professeur de finance à l'Edhec. En outre, les hedge funds, adeptes de techniques contra-cycliques, pourraient bien, d'ici six à douze mois, sortir gagnants de la crise, présage M. Julliard. Des fonds comme Citadel, spécialisés dans la reprise de fonds en difficulté, pourraient profiter de la baisse des prix pour acheter.
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