Sauvons l'Europe avant qu'il ne soit trop tard | |||||||||
Un effondrement des pays de l'est du continent menacerait l'UE telle que nous la connaissons. A la veille du sommet européen du 1er mars consacré à la crise économique, The Economist appelle les Vingt-Sept à prendre les mesures qui s'imposent. | |||||||||
Mais, si un pays comme la Hongrie ou l'un des trois Etats baltes devait s'effondrer, l'ouest de l'Europe serait l'une des principales victimes de l'onde de choc. Les banques autrichiennes, italiennes et suédoises, qui ont massivement investi et prêté aux nations d'Europe orientale, enregistreraient des pertes colossales si la valeur de leurs avoirs dégringolait subitement. La vague de défauts de paiement qui s'ensuivrait, ajoutée aux réflexes protectionnistes de chacun, pourrait facilement réduire à néant l'une des plus grandes réussites européennes, le marché unique. Un effondrement des pays de l'est de l'Europe soulèverait rapidement de nouvelles interrogations sur l'avenir de l'UE, et la zone euro serait déstabilisée car certains de ses membres, comme l'Irlande ou la Grèce, ne sont pas en meilleure forme que l'Europe orientale. Toute perspective de nouvel élargissement serait de plus condamnée, ce qui ne manquerait pas de faire ressurgir des doutes sur l'avenir des Balkans, de la Turquie et de plusieurs pays de l'ancienne Union soviétique. Les conséquences politiques pourraient être pires encore. L'une des plus belles réussites de l'Europe ces vingt dernières années est d'être parvenue à réunifier le continent de manière pacifique après la chute de l'empire soviétique. La Russie traverse elle-même de graves difficultés économiques mais ses dirigeants n'ont pas perdu leur habitude d'exploiter la moindre occasion pour réaffirmer leur influence sur la région. En outre, si les populations d'Europe orientale avaient le sentiment d'avoir été abandonnées par l'Ouest, elles pourraient être tentées par le genre de populistes et de nationalistes qui ont trop souvent pris le pouvoir au cours de l'histoire de l'Europe. La question qui se pose aux dirigeants européens est de savoir comment éviter une telle catastrophe. Même si les marchés considèrent souvent l'Europe orientale comme un seul bloc économique, les pays de cette région sont différents. Trois grands groupes se dégagent. Le premier comprend des pays qui ne sont pas près de rejoindre l'UE, comme l'Ukraine. Les institutions européennes peuvent aider ces pays financièrement ou par des conseils, mais c'est surtout au FMI de supporter le fardeau. Les choses sont différentes pour les pays plus à l'ouest, qui sont tous membres de l'UE et donc sous la responsabilité de l'Union. L'un des remèdes les plus préconisés serait d'accélérer leur accession à l'euro ou même de les laisser adopter immédiatement la monnaie unique. Une proposition qui aurait un sens pour les quatre pays dont les taux de change sont indexés sur l'euro : le trio baltique Estonie, Lettonie et Lituanie plus la Bulgarie (la Slovénie et la Slovaquie sont déjà passées à l'euro). Mais la Banque centrale et la Commission européennes s'opposent fermement à cette forme d'euroïsation. Une adoption unilatérale ou accélérée de l'euro serait beaucoup moins raisonnable pour un troisième groupe composé de pays plus grands, aux taux de change flottants : la République tchèque, la Hongrie, la Pologne et la Roumanie. Aucun d'eux n'est prêt à endurer l'exigeante discipline d'une monnaie unique qui exclut la possibilité d'une éventuelle dévaluation. Leur entrée prématurée pourrait même affaiblir l'euro de manière fatale. La première des priorités pour ces quatre pays est d'endiguer l'effondrement de leur monnaie. L'UE doit également pousser les pays d'Europe orientale à reprendre les réformes structurelles auxquelles ils se sont pour l'instant soustraits. Pour les dirigeants européens, le sauvetage de ce même plombier polonais qui a volé le pain des travailleurs sera difficile à faire passer auprès de la population à Berlin, Bradford et Bordeaux, d'autant plus que la droite xénophobe se fait chaque jour plus tonitruante. Les contribuables allemands craignent pour leur argent si durement gagné. La facture risque en effet d'être salée mais, à vrai dire, les pays d'Europe occidentale n'ont pas les moyens de ne pas la payer. L'effondrement d'un pays de l'UE, sans parler du démantèlement de l'euro ou du marché unique, serait une catastrophe pour l'Europe entière ; et il y a peu de chances pour que les Etats-Unis, la Chine ou tout autre pays nous viennent en aide. Il n'est sans doute pas trop tard pour porter secours à l'Est [le 27 février, la Banque européenne pour la reconstruction et le développement (BERD), la Banque européenne d'investissement (BEI) et la Banque mondiale se sont associées pour aider les banques des pays d'Europe orientale à hauteur de 24,5 milliards d'euros sur deux ans] ; mais les politiques doivent dès maintenant se prononcer en faveur de ce sauvetage. |
Commentaires